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23 Octobre 2009

Recrutement vert

Recrutement vert

 

Sacs recyclables, détergents biodégradables, énergies propres sont au goût du jour et ne cessent de faire des adeptes. Mais au-delà des gestes posés pour le bien de la planète, l'environ­nement est une industrie qui recherche des travailleurs.

La majorité des entreprises du secteur sont partagées en quatre sous-secteurs selon leur champ d'activité : l'eau; l'air; les sols et les eaux souterraines; les matières résiduelles. Une autre catégorie un peu fourre-tout nommée «environnement général» englobe également la gestion environnementale, la valorisation des matières résiduelles et les nouvelles technologies vertes.

Selon Statistique Canada, avec ses 1 600 établissements qui emploient environ 32 000 personnes, le Québec se classe au deuxième rang des provinces canadiennes qui comptent le plus d'entreprises et d'emplois dans ce domaine, après l'Ontario. Le Québec occupe aussi la deuxième place des provinces qui ont les plus gros revenus environnementaux et qui enregistrent les plus grandes ventes de services et de biens environnementaux.

Une industrie anti-récession

Dominique Dodier, la directrice générale d'EnviroCompétences, le Comité sectoriel de main-d'œuvre de l'environnement, croit que le Québec va poursuivre sur sa lancée. Elle souligne que dans le Diagnostic industriel et de main-d'œuvre en environnement, publié par son orga­nisme en 2007, on anticipait un taux de croissance de l'emploi de 26 % dans l'industrie jusqu'en 2010. «Cette prévision s'est révélée juste jusqu'à aujourd'hui, et lorsque nous les consultons, la plupart des employeurs du secteur confirment qu'ils ont besoin de travailleurs», souligne-t-elle.

Plusieurs éléments concourent à rendre cette industrie vigoureuse. Dominique Dodier mentionne notamment la réglementation gouvernementale, qui impose depuis quelques années une vigilance accrue dans le domaine environnemental, par exemple en ce qui a trait au contrôle de l'eau potable. «Même en période de récession, les lois continuent de s'appliquer», fait-elle valoir.

La directrice générale montre aussi du doigt l'arrivée prochaine de la norme ISO 26 000, qui a trait à la responsabilité sociétale des entreprises en développement durable. Pour s'en prévaloir, elles devront se qualifier en matière de gestion environnementale. «Les compagnies commencent à s'apercevoir que la réduction de leur consommation d'énergie et une meilleure gestion des déchets, par exemple, permettent des économies», note Dominique Dodier.

Autant de bonnes raisons de croire que la province va poursuivre son virage vert et que les entreprises du domaine vont se multiplier dans chacun des sous-secteurs.

Eau

Petit ruisseau deviendra grand
Le Règlement sur la qualité de l'eau potable, entré en vigueur en juin 2001 et modifié à plusieurs reprises depuis, a propulsé les entreprises qui s'occupent d'assurer la production et le traitement des eaux.

Ce règlement prescrit des normes et des contrôles de la qualité de l'eau très rigoureux. Il oblige également les opérateurs d'une installation de captage, de traitement ou de distribution des eaux desservant plus de 20 personnes à posséder un diplôme du ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport ou un certificat d'Emploi-Québec.

Selon le Diagnostic industriel et de main-d'œuvre en environnement d'Enviro­Compétences, près de 56 % des compagnies de ce secteur prévoient une croissance de leurs effectifs d'ici à 2010.

Aquatech, une entreprise de 95 employés située à Longueuil et spécialisée dans la gestion d'usines de production d'eau potable et de traitement des eaux usées, a pris un nouvel essor avec l'entrée en vigueur du Règlement sur la qualité de l'eau potable en 2001. «Nous faisons de l'impartition de main-d'œuvre [opérateurs et techniciens], indique son directeur général Jean-Guy Cadorette. Les petites municipalités qui ne peuvent se permettre d'avoir des employés à temps plein nous confient le mandat de faire fonctionner leurs usines. Pour répondre à la demande, il a fallu embaucher une trentaine d'employés supplémentaires au cours des dernières années», dit-il.

«Le secteur de l'eau est très actif, con­firme Dominique Dodier, mais il connaît une rareté de main-d'œuvre.» En effet, techniciens et opérateurs d'usines semblent difficiles à dénicher : ce sont désormais des métiers réglementés, et qui plus est, les établissements de formation comptent peu de diplômés.

Jean-Guy Cadorette constate aussi que cette main-d'œuvre est rare. «C'est un métier mal connu et peu populaire auprès des élèves. Pourtant, ce type d'emploi est valorisant et permet d'accéder à des responsabilités importantes : celle d'assurer à la population une eau potable de qualité», dit-il.

Aquatech est également active sur le plan international, en Algérie et au Maroc notamment, où elle fournit expertise et soutien technique. Cette ouverture sur le monde constitue d'ailleurs un élément d'attraction pour les candidats désireux de relever des défis.

Air

Le vent dans les voiles
La population est de plus en plus soucieuse de la qualité de l'air qu'elle respire. Ce souci alimente les entreprises spécialisées dans l'assainissement et l'hygiène de l'air. «Cela inclut l'air extérieur [pollution atmosphérique, gaz à effet de serre] ainsi que l'air à l'intérieur des bâtiments», explique Dominique Dodier. Techniciens en assainissement de l'air, hygiénistes de l'air et chimistes de l'air sont autant de spécialistes recherchés dans ce sous-secteur.

Selon le Diagnostic industriel et de main-d'œuvre en environnement d'EnviroCompétences, plus de 44 % des compagnies du domaine prévoient accroître leurs effectifs d'ici à 2010.

Hydrauliques R & O Services, une entre­prise située à Mont-Royal, emploie une trentaine d'employés. Sa spécialité? L'équilibrage des systèmes de chauffage, de ventilation et d'air climatisé (CVAC), ainsi que l'inspection, le nettoyage et l'entretien des conduits de CVAC. «Nous travaillons principalement pour le secteur institutionnel et les édifices de bureaux», indique son président, Jean-Paul Leblanc.

Ce dernier estime que le volume d'affaires de sa compagnie augmente régulièrement. «On fait de plus en plus appel à nos services, c'est un secteur d'activité émergent. La population est davantage consciente de l'importance d'avoir un environnement de travail sain. Par ailleurs, à Montréal, avec les infrastructures vieillissantes, il y a beaucoup d'édifices dont les systèmes de CVAC doivent être nettoyés, entretenus et inspectés», ajoute-t-il.

Hydrauliques R & O Services embauche régulièrement, notamment des diplômés de la formation professionnelle ou technique en mécanique du bâtiment ou en électromécanique. «Mais dans le réseau de l'enseignement, il n'existe pas de formation spécifique à l'assainissement et à l'équilibrage. Aussi, pour répondre à nos besoins, nous donnons aux employés une formation à l'interne», précise Jean-Paul Leblanc.

Comme dans le secteur de l'eau, les diplômés ne sont pas légion et il n'est pas toujours facile de mettre la main sur des travailleurs. «On essaie de recruter des stagiaires dans le cadre de leur diplôme d'études collégiales, et de les garder ensuite à notre service. Mais là encore, on a de la difficulté à les dénicher», déplore le président.

Sols et eaux souterraines

Creusez, vous trouverez
Les sols et eaux souterraines cons­tituent un autre des segments les plus prometteurs en ce qui a trait à la croissance de la main-d'œuvre. Le Diagnostic industriel et de main-d'œuvre en environnement d'EnviroCompétences indique que 60 % des compagnies actives dans ce domaine prévoient une croissance de leurs effectifs d'ici à 2010.

C'est un secteur en progression et très réglementé, soutient Dominique Dodier, notamment par le Règlement sur l'enfouissement des sols contaminés, le Règlement sur la protection et la réhabilitation des terrains et la Politique de protection des sols et de réhabilitation des terrains contaminés. «La réglementation qui oblige, par exemple, à s'assurer que le sol est de bonne qualité avant d'ériger une nouvelle construction favorise la demande de spécialistes en analyse et décontamination des sols.» À noter que le secteur des sols et eaux souterraines regroupe également les compagnies spécialisées en fabri­cation et installation de fosses septiques.

Renée Émond est présidente-directrice générale de BIOLAB, une entreprise qui compte des laboratoires d'analyses environnementales dans plusieurs villes du Québec. BIOLAB emploie 80 personnes, notamment des chimistes, des microbiologistes et des techniciens de laboratoire. Elle explique que leur clientèle est variée : «Il s'agit principalement d'industries telles que des papetières, des alumineries, ou encore des municipalités ou des firmes de consultants en environnement.»

BIOLAB analyse des échantillons d'eau potable, d'eaux usées et d'eau souterraine (nappe phréatique), des sols contaminés et des sédiments, des boues, des huiles usées, des déchets solides ou dangereux, de la neige usée, etc.

Renée Émond confirme que la réglementation qui accroît les analyses environnementales obligatoires favorise l'essor de cette industrie. D'ailleurs, on embauche régulièrement chez BIOLAB. «Mais en région, le recrutement n'est pas facile, car il n'y a pas toujours d'établissements d'enseignement à proximité. Il faut alors dénicher les diplômés ailleurs», relève-t-elle.

Matières résiduelles

Récupérer et traiter
Recyclage, gestion des déchets, intervention en cas de déversement de matières résiduelles dangereuses sont autant d'activités relevant de ce secteur. Plus de 21 % des entreprises du domaine prévoient accroître le nombre de leurs travailleurs d'ici à 2010, selon le Diagnostic industriel et de main-d'œuvre en environnement d'EnviroCompétences. Conducteurs de camions, mécaniciens, aides-éboueurs et valoristes en centres de tri sont particulièrement recherchés, mentionne l'étude.

Veolia Services à l'environnement est un géant de la gestion des matières rési­duelles. La multinationale est présente dans 70 pays à travers le monde. Au Québec, elle emploie 2 800 travailleurs au sein de 22 places d'affaires. L'entreprise a plusieurs divisions comme l'assainissement et la réhabilitation des réseaux de conduites souterraines, la valorisation énergétique des déchets et le nettoyage industriel.

«Nous offrons nos services entre autres à des raffineries, des usines de pâtes et papiers, des industries minières et des municipalités. En cas de déversement de matières dangereuses dans une entreprise, nous envoyons une équipe les récupérer dans un camion spécial. Nous vidangeons aussi les réservoirs de pétrole. Les déchets sont ensuite transportés vers un centre de transfert où ils sont traités», indique Gilles Proulx, président-directeur général de la division québécoise de la compagnie.

Veolia assure également un service de collecte et de traitement des huiles usagées dans les ateliers de mécanique. Elle récupère aussi des résidus de gaz de Gaz Métropolitain et les utilise pour chauffer différents bâtiments comme l'hôtel Fairmont Le Reine Elizabeth à Montréal.

Même s'il admet qu'avec la récession ses plus gros clients (papetières, mines, etc.) se montrent un peu plus prudents dans leurs dépenses, Gilles Proulx estime que la diversité des activités de l'entreprise lui permet de tirer son épingle du jeu. Il embauche d'ailleurs régulièrement. La main- d'œuvre recherchée possède au minimum un diplôme de cinquième secondaire ou de collégial technique, et poursuit sa formation à l'interne. «Chez nous, c'est comme une université», soutient Gilles Proulx.

Les recrues suivent une formation de quatre à six ou huit semaines, adaptée aux méthodes et aux besoins de la compagnie, pour accéder entre autres aux postes d'opérateur de nettoyage industriel et d'opérateur au centre de transfert de matières dangereuses.