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30 Novembre 2016

La transformation digitale pousse-t-elle à remplacer les ressources humaines par les relations humaines?

La transformation digitale pousse-t-elle à remplacer les ressources humaines par les relations humaines?

Le propos du philosophe Jean Bodin : « il n’y a richesse, ni force que d’hommes » nous interroge. Cet adage peut être interprété à double sens : la version humaniste et la version mercantile. L’homme serait donc source de valeur pour les uns, de profit pour les autres. L’homme est une ressource parmi tant d’autres (finances, matières premières…) et le terme de « capital humain » est souvent employé pour désigner l’ensemble des collaborateurs de l’entreprise, c’est pourquoi l’acronyme RH n’a cessé d’évoluer, suivant à la fois les transformations de la société et des entreprises.

La fonction, exercée d’abord par le chef d’entreprise, est devenue la fonction « personnel ». Le chef du personnel a avant tout des prérogatives administratives. Lui succède le directeur des relations humaines, témoin de l’évolution de la fonction. Celle-ci devenant stratégique, on parle alors de direction des ressources humaines.

L’évolution sémantique semble lisible et pourtant, un débat questionne sur la pertinence de l’utilisation du terme « ressources humaines », à l’heure de la transformation numérique de l’entreprise. L’enjeu de la digitalisation dans les organisations nous conduit à revoir les relations humaines de l’entreprise (relations sociales, SIRH, communication, méthodes de recrutement via les réseaux sociaux). Il s’agit alors de réfléchir à la place du collaborateur. « Les deux choses les plus importantes n’apparaissent pas au bilan de l’entreprise : sa réputation et ses hommes ». (Henry Ford)

Un nom = une fonction

Les RH (relations humaines)

 

L’histoire commence au début du XXe siècle, lorsque Henri Fayol, ingénieur français, évoque la notion de « corps social ». L’histoire se poursuit par les expériences de Hawthorne à la Western Electric, avec Mayo et la fondation de « l’École des relations humaines ».

Satisfaction et bien-être du personnel « obtiennent alors droit de cité ouvrant le champ de la gestion du personnel à des logiques issues de la psychologie industrielle et des sciences du comportement ». (Pesqueux, 2015) On voit alors se développer la sociologie au travail, la psychologie sociale et on s’intéresse à l’importance du climat psychologique sur le comportement et la performance des travailleurs.

Les RH (ressources humaines)

 

La terminologie « ressources humaines » suppose que le collaborateur soit considéré comme une ressource au service de la performance économique de l’entreprise. La gestion des ressources humaines s’organise dans l’entreprise et se complexifie lors du développement de l’organisation. On parle alors de structuration sociale. Le service RH prend deux dimensions : l’une quantitative (gestion de la quantité de travail disponible en fonction des besoins identifiés), l’autre qualitative qui permet de disposer des compétences nécessaires au bon moment. (GPEC, motivation, recrutement)

Un nom = un vrai-faux débat

 

Comme l’histoire se répète, après avoir été abandonnée, la terminologie « relations humaines », réapparaît !

Parmi les principaux défis de la fonction RH, on note la transition numérique. L’intégration des nouvelles technologies modifie les missions RH.En matière de formation, l’e-learning apparaît comme nouveau mode d’apprentissage. En matière de Recrutement, les réseaux sociaux sont désormais incontournables. Le rôle croissant du SIRH (portail RH, intranet RH) participe également à cette transition.

Le service RH est donc désormais sollicité dans le choix des technologies de communication et joue alors un rôle primordial dans l’accompagnement des équipes dans l’appropriation des nouveaux outils.

L’émergence du digital suppose l’évolution des hommes et des organisations et coïncide avec l’arrivée de nouvelles relations. L’enjeu étant de tisser des liens (sur la toile), on parle à nouveau de relations humaines.

Un consultant américain, Bernard Marr, à travers un post largement relayé sur LinkedIn, soulève le débat quant à la pertinence du terme « ressources humaines ». Si le premier actif d’une entreprise sont ses salariés, peut-on les considérer comme de simples ressources ? (business.lesechos.fr – 20 janvier 2014)

Le terme employé pour désigner la fonction DRH ne serait donc pas correct ! En effet, les services RH seraient confrontés à la difficulté de concilier les demandes des salariés et du patron… Il faudrait alors distinguer la gestion des hommes au travail (bien-être, conditions de travail, culture d’entreprise, relations sociales) et la gestion de la force de travail (GPEC, formation, recrutement).

Il est grand temps donc de trancher sur la terminologie employée, porteuse de sens et d’enjeux. D’ailleurs, Jacky Lhoumeau, ex-DRH d’un site de Sanofi s’autoproclamait dans Les Échos Business « dernier dinosaure de la fonction directeur des relations humaines ». Sophie Coustaury, qui exerce la fonction chez Nespresso France, préférerait le titre de directrice des talents humains.

« Derrière l’idée de ressource, il y a la notion de quantité alors que les RH doivent mettre en avant la créativité et l’individualité des collaborateurs, au service d’un collectif ».
(Florian Debès, Les Échos, 2014)

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