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28 Mars 2013

Draper University, l'école (de commerce) des héros

Par Yannick Demoustier

Les jeunes du monde entier se ruent pour acquérir les superpouvoirs qu'enseigne cette étonnante Business School américaine, fondée par un investisseur réputé.

Chantez-nous une chanson". Non, ce n'est pas le casting de The Voice mais l'une des nombreuses questions loufoques du formulaire d'inscription de la Draper University of Heroes. Autres exemples : "Pourquoi êtes-vous sur terre ?", "Que demanderiez-vous à votre robot ?" ou encore "Qui est votre héros ?".

Cette dernière est fondamentale. Car l'objectif revendiqué de l'université privée Draper est de créer des "héros", des (entre)preneurs de risques. "Des super-héros, corrige même le fondateur Tim Draper. Nous fournissons ce qui manque le plus dans l'éducation traditionnelle : l'extraordinaire."

Pendant huit semaines, les "héros" de l'université Draper, située dans la célèbre Silicon Valley, apprennent à devenir des entrepreneurs hors-pairs grâce à des cours qui sont tout sauf ordinaires, allant de la survie en milieu urbain à l'apprentissage des arts martiaux, en passant par le yoga. Les différents cours sont répartis en huit disciplines telles que "survie", "créativité" ou, plus classique, "argent et ressources". Dans celle intitulée "superpouvoirs", on trouve le cours "détecteur de mensonges" ou dans "vision", celui de "futurologie". "Nous n'enseignons pas l'histoire mais l'avenir", proclame Tim Draper.

L'homme sait de quoi il parle : depuis 28 ans, il investit dans les start-up (Skype et Hotmail notamment) et son fonds, Draper Fisher Jurvetson, a amassé au fil des années plus de sept milliards de dollars. "J'ai toujours pensé que les entrepreneurs étaient des héros", explique celui qui a même écrit une chanson à leur gloire, The Riskmaster (le maitre des risques), qu'il chante volontiers à la fin de ses discours.

"A travers mes nombreuses expériences professionnelles, j'ai rencontré des entrepreneurs extraordinaires", ajoute-t-il. Des relations qui, à l'instar de Ron Johnson, PDG de la chaîne de grands magasins J.C. Penney, ou Shawn Fanning, co-fondateur de la plateforme de musique en ligne, Napster, transmettent leur savoir et leurs expériences aux héros en devenir de l'université Draper.

Concrètement, une fois inscrits, les 40 étudiants de la Draper University sont répartis en équipes de cinq ou six qui resteront les mêmes tout au long de la formation. "Nous avions un emploi du temps très vague car on nous surprenait sans cesse, se souvient Christine Guibara, élève de la toute première session de l'école durant l'été 2012. Presque tous les jours, je me retrouvais en dehors de ma zone de confort."

Les cours et les activités gomment les repères des jeunes étudiants (la plupart ont entre 18 et 26 ans) afin de les préparer à l'inconnu, à l'imprévisible. "Au fur et à mesure, ils gagnent en confiance, observe Tim Draper. Il faut qu'ils soient préparés à l'évolution incessante du monde qui les entoure."

D'où les séances de karting pour inculquer cette rapidité de changement. Ou les matchs de volleyball avec deux ballons pour rendre compte de l'imprévisible. Afin d'être totalement investis pendant ces huit semaines, les apprentis doivent loger dans les locaux de l'université, composés d'un ancien hôtel de 90 chambres et de magasins d'antiquités réhabilités. Le rachat de ces bâtiments pèse pour une part importante des 20 millions de dollars investis par Tim Draper.

Cette année, trois sessions sont prévues à partir d'avril pour accueillir les prochains superhéros. Mais les superpouvoirs ont un prix : 7 500 dollars. Cependant, les candidats peuvent préférer reverser 2% de leurs revenus des dix prochaines années. D'autres arrangements sont aussi possibles. Ainsi, une candidate, pilote de course, affichera désormais le logo de l'université Draper, un bouclier, sur sa voiture. Tim Draper souhaite également investir dans les projets de ses étudiants.

"Les jeunes qui entrent à l'université ont l'opportunité de réellement impacter l'économie mondiale", estime-t-il. Par exemple, suite à sa formation "héroïque", Christine Guibara, qui conçoit et vend de bijoux originaux par le biais de la société qui porte son nom, a décidé de créer un incubateur pour joailliers. "L'université Draper nous fait prendre conscience de notre potentiel, explique-t-elle. Surtout, je me rends compte que non seulement je peux développer mon entreprise mais aussi influencer mon secteur d'activité de manière révolutionnaire. C'est ça être un héros."

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