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5 Avril 2011

De la formation professionnelle aux organisations apprenantes. Par Hervé Sérieyx

 

Chacun connaît aujourd'hui le rapport-choc de l'Unesco : « Vers les sociétés du savoir » publié en 2005 et remis à jour en 2008. Il y est souligné que la conjonction de la concurrence mondialisée, de l'intense développement de l'innovation que celle-ci va susciter et de la percussion des TIC sur toutes les activités humaines va rendre obsolètes d'ici 10 ans 80% des connaissances nécessaires pour maîtriser un métier quel qu'il soit. Au-delà du côté un peu excessif d'une telle affirmation, bien faite pour frapper les esprits, personne ne peut douter du renouvellement accéléré des savoirs au coeur de l'économie dans les années qui viennent. La formation professionnelle : une petite partie de la réponse.

Dans nos entreprises, on voit mal comment la formation professionnelle, telle qu'elle est actuellement conçue, pourrait permettre ce permanent aggiornamento des compétences pour les ajuster à l'évolution hyper rapide du contenu des emplois ; et cela, au moins pour trois raisons : cela supposerait de renvoyer sans cesse en formation tous ceux qui produisent chaque jour des biens et des services et ceux qui les accompagnent en activités de soutien ; par construction, l'essentiel de la formation professionnelle se diffuse dans des stages, des séminaires ou des sessions qui ont été conçus à partir d'un état de l'art passé et non de ce qui va advenir ; un bon nombre de ceux qui animent ces actions de formation - les formateurs - ont quitté le terrain opérationnel depuis quelques années et risquent de transmettre souvent, quelles que soient leurs bonnes intentions, des façons de faire dépassées. Dans un monde de l'entreprise, aux compétences de plus en plus évolutives, rien ne serait pire que de former aux nécessaires savoirs de demain en ayant recours aux messages et aux messagers d'hier.

Les organisations apprenantes : la nouvelle frontière de la formation

Bien sûr, la formation professionnelle, dans ses formes traditionnelles, va conserver une place importante de transmission des fondamentaux : savoirs de base, modes de fonctionnement des organisations etc. Mais on peut gager que, pour l'essentiel, ce qui permettra l'ajustement permanent des compétences au changement continu des contenus des emplois ce sera des organisations apprenantes.

Rappelons de quoi il s'agit : une organisation est dite apprenante quand elle est conçue non seulement pour atteindre les objectifs opérationnels qui la justifient (construire un pont, assurer des nuits d'hôtel, attribuer des permis de construire...) mais aussi pour qu'il lui soit possible :

 d'apprendre de ses propres expériences (succès, échecs)
 d'apprendre de l'extérieur (autres modèles, autres façons de fonctionner)
 de s'enrichir d'innovations internes et externes
 et surtout de permettre à ceux qui oeuvrent en son sein de développer leurs compétences grâce à leur simple action quotidienne.

Reconnaissons qu'aujourd'hui, dans beaucoup d'entreprises privées et publiques, et plus encore dans les administrations, les organisations sont encore fort « routinisantes », conçues de façon mécanistes et bien peu apprenantes. C'est pourtant à ce prix qu'elles pourront, bien plus qu'avec la formation professionnelle traditionnelle, permettre aux collaborateurs d'ajuster en continu leurs compétences aux nouvelles exigences imposées par les mutations du monde. Un chantier complètement nouveau, à ouvrir d'urgence.