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21 Juin 2012

Vers une crise mondiale de l'employabilité ?

D'après une étude mondiale réalisée par ManpowerGroup, les employeurs n'ont pas pris la mesure de la pénurie de talents qui atteint en 2011 des niveaux record depuis le début de la crise en 2007. Explications...


34 % des employeurs dans le monde rencontreraient des difficultés à pourvoir leurs postes vacants. Tel est le principal enseignement de la sixième édition de l'enquête annuelle de ManpowerGroup sur la pénurie de talents réalisée auprès de 40 000 employeurs dans 39 pays. C'est au Japon (80 %) que la guerre des talents atteint son paroxysme, mais des pays comme l'Inde (67 %), le Brésil (57 %), l'Australie (54 %) ou les Etats-Unis (52 %) sont presque aussi mal lotis. Au pays de l'oncle Sam, le nombre d'employeurs ayant des difficultés à recruter a même augmenté de 38 points en un an. A côté, la France (20 %) et le Royaume-Uni (16 %) semblent relativement épargnés...


Pour expliquer ces difficultés de recrutement, 90 % des employeurs mettent en avant des considérations liées aux candidats eux-mêmes : insuffisance de compétences, d'expérience ou de qualification, manque de savoir-être... De là à y voir l'annonce d'une crise mondiale de l'employabilité, il n'y a qu'un pas, qui est allégrement franchi par les auteurs de l'étude.


Une pénurie qui impacte l'activité


C'est sur les postes de techniciens, commerciaux, vendeurs qualifiés et ingénieurs que les entreprises ont le plus de mal à recruter. La France se distingue elle avec un classement sensiblement différent puisque les pénuries de talents portent essentiellement sur les vendeurs qualifiés, les chauffeurs, les commerciaux, les cuisiniers, et les secrétaires, agents administratifs et employés de bureau.


L'étude montre en outre que cette pénurie de talents a impacté l'activité pour plus de la moitié des employeurs interrogés, avec des conséquences élevées (20 %) ou moyennes (37 %). Lorsqu'on interroge les entreprises sur les stratégies mises en œuvre pour surmonter ces difficultés, seulement 21 % d'entre elles ont développé des formations supplémentaires par leurs staffs actuels, alors que le manque de compétences et d'expérience sont citées comme les principales sources de leurs difficultés à recruter. Ce qui fait dire aux auteurs de l'étude que les employeurs n'ont pas pris la mesure de la gravité de cette pénurie de talents.


Les limites du « just in time »


Pour faire face à ces nouveaux enjeux, ManpowerGroup les invite à revoir leur modèle de travail et leurs pratiques RH, mais aussi à définir une nouvelle stratégie sur le marché de l'emploi. « Alors que les bouleversements et la complexité de l'après-crise ont irrévocablement transformé la façon dont le monde fonctionne, les employeurs ne peuvent plus continuer dans une approche « just in time » du recrutement selon laquelle le talent serait mobilisable « à la demande », où ils veulent, quand ils veulent, estime Jeffrey Joerres, PDG de ManpowerGroup. Aucune entreprise au monde ne définirait une stratégie de croissance sans avoir identifié une offre disponible de matières premières ; ainsi, les employeurs doivent s'assurer qu'ils disposent des talents nécessaires à la réalisation de leurs objectifs business. »


Pour ce faire, ManpowerGroup préconise la définition d'une stratégie RH holistique qui tienne compte à la fois de la demande interne et des facteurs déterminants les variations de l'offre externe de talents comme les évolutions démographiques, la rapidité des changements technologiques ou la progression des marchés émergeants. Les employeurs devraient également passer au crible les fiches de postes clés sur lesquels ils ont du mal à recruter afin de s'assurer que les méthodes et les langages de recrutement restent en adéquation avec l'évolution des compétences nécessaires à l'accomplissement de ces tâches. ManpowerGroup conseille enfin aux employeurs de se détacher de leur traditionnel programme de formation pour braquer les projecteurs sur le développement de l'expérience, en confiant par exemple à leurs collaborateurs des projets étendus qui leur permettront d'atteindre les objectifs escomptés, mais aussi de développer leur potentiel et les compétences qui comptent dans l'entreprise.

Yves Rivoal